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Compte-rendu de la journée du 17 mars 1999

En liaison avec l'Université de La Réunion, l'I.U.F.M. et M. l'I.P.R. d'Histoire-géographie, l'A.P.H.G. organisait le 17 mars 1999 une rencontre sur le thème: Présentation des recherches effectuées en histoire-géographie à l'Université et à l'I.U.F.M. de La Réunion.

Quinze enseignants de l'Université et de l'I.U.F.M. ont donc présenté ce jour-là leurs recherches respectives à plus de 80 collègues du secondaire, venus de toute l'île, ( sans congé particulier!). Ce fut une grande richesse que de pouvoir être tenus informés, pour les uns, de travaux de grande qualité, de pouvoir en discuter avec leurs auteurs, et, pour les autres, de prendre en compte les besoins d'enseignants, désireux de s'appuyer sur la recherche universitaire et pédagogique, afin de construire des cours réactualisés, et...pour ne pas sombrer dans la routine!

Voici donc quelques extraits des travaux présentés, tous en cours de réalisation ou d'achèvement; le compte-rendu complet figure dans notre bulletin spécial de Décembre 1999.

 

Sommaire

BALARD Martine: Projet de recherches autour de l'oeuvre de Raymond DECARY

BENJAMIN Didier et GODARD Henry: Du volume "Les Outre-mers" au réseau Outre-Mers (R.O.M.)

COMBEAU Yvan : Recherches sur l'Histoire de La Réunion et des îles de l'Océan indien

FONTAINE Guy : Présentation du département Géographie de l'Université de La Réunion

GERAUD Jean-François: Patrimoine industriel: le sucre à BOURBON

MARTINEZ Paul François: Résumé de thèse: géopolitique de La Réunion

MEURE Claude: Le suffrage universel à La Réunion à travers les élections de 1914 à 1929

LOPEZ Albert: La population de La Réunion sur support CDROM

PARIAT Philippe: La perception des faits nationaux et internationaux à travers la presse réunionnaise de 1848 à 1946

TAVAN Martine: Histoire et Géographie: des représentations disciplinaires à la construction des savoirs

VEYSSIERE Gérard: Enseignement de l'histoire médiévale à l'université de La Réunion et recherches effectuées

VILLECROIX Pascal: Le développement bipolaire du tourisme international à Zanzibar


Du volume "Les outre-mers" au réseau outre-mers (ROM)

Didier BENJAMIN, professeur en classes préparatoires

Henry R. GODARD, professeur des universités

 

Le volume "Les outre-mers" de l'Atlas de France a été publié en février 1998 par La Documentation française et le GIP Reclus. Le Réseau outre-mer (ROM), officialisé en décembre 1998, comble une lacune puisqu'il n'existe plus en France de centre de recherche travaillant sur l'ensemble des espaces ultramarins. Ce réseau dynamique vise à mettre en synergie les activités scientifiques des laboratoires de géographie des outre-mers, de centres de recherche métropolitains et d'institutions publiques. Il doit étroitement associer actions pédagogiques, opérations scientifiques, et interventions ponctuelles en matière de recherche-action.

 

Composée d'une trentaine d'auteurs réunis afin de réaliser le volume "Les Outre-mers", l'équipe de travail a fonctionné, dès le début, en en réseau. Le choix de cette structure répondait à une double contrainte: tenir les délais de publication et resserer les liens entre des collaborateurs dispersés en métropole (Bordeaux, Chambéry, La Rochelle, Montpellier et Paris) et dans les DOM ( Cayenne, Fort de France, Pointe-à-Pitre et Saint Denis). Les institutions qui ont collaboré à la réalisation de ce tome de l'Atlas de France, sont présentes dans le Réseau outre-mers (ROM) -INSEE- ou sont prêtes à y entrer -Institut d'émission des départements d'outre-mer et Institut d'émission d'outre-mer (IEDOM/IEOM), Conférence des régions périphériques maritimes d'Europe (CRPM), autorités locales et régionales. L'intérêt porté par ces organismes publics et parapublics aux thématiques et aux champs géographiques couverts par le volume "Les Outre-mers" confère au ROM le statut d'une institution dont les structures sont opérationnelles depuis le mois de décembre 1998.

Le réseau outre-mers (ROM); le montage institutionnel

L'organigramme est conçu comme une structure transversale qui permet à chacun des partenaires engagés dans ce programme , qu'il s'agisse des cinq pièces maîtresses du ROM ( les quatre centres de recherche et le secrétariat d'Etat à l'Outre-mer) ou des intervenants extérieurs, partenaires potentiels, de conserver un maximum de liberté scientifique.

Les trois antennes responsables de chacune des aires géographiques sont localisées dans les centres de recherche en géographie de l'université française du Pacifique (Laboratoire de géographie tropicale) et des universités des Antilles et de la Guyane (GEODE Caraïbe) et de la Réunion (CREGUR). Une antenne du ROM est localisée en métropole pour des raisons pratiques (proximité des centres de décision et des sources de financements, accès rapide à certaines données...). Elle est implantée à l'université de La Rochelle dans les locaux de LEMRI.

Ce laboratoire pluridisciplinaire, qui rassemble des enseignants-chercheurs ayant collaboré au volume "Les outre-mers", étudie déjà les espaces ultramarins et bébéficie de relations privilégiées avec les centres de recherche des universités établies outre-mer. Le secrétariat d'Etat à l'Outre-mer, qui participe financièrement à l'opération et avec lequel ont été définis des thèmes prioritaires de recherche, est le cinquième élément du ROM.

Enfin, les dépenses induites par la constitution du ROM sont faibles. Elles couvrent les frais de fonctionnement de chacune des antennes et l'acquisition de données de base (données statistiques, ouvrages,etc.). Elles servent aussi à effectuer des échanges de données et des publications communes, contribuant ainsi à une meilleure coordination de certaines recherches. Les locaux existent, les équipements informatiques sont disponibles et les chercheurs publient régulièrement des ouvrages et des articles traitant chacun des outre-mers. Il s'agit de mettre en synergie l'ensemble des ressources humaines des quatre laboratoires et du secrétariat d'Etat.

L'organigramme du Réseau Outre-mers (ROM)

Le réseau outre-mers (ROM): les tâches prioritaires

Dans un premier temps (année universitaire 1998-1999), huit actions sont menées:

1. constitution de fiches concernant les laboratoires et les chercheurs de chaque antenne du ROM - afin de connaître le profil des chercheurs et les programmes en cours- et de fiches techniques relatives aux laboratoires transversaux ( cartographie, audio-son, multimedia)

2. mise en place d'une bibliographie sur les outre-mers qui rassemblera ouvrages, articles, mémoires, cartes... qui sont disponibles dans chaque bibliothèque et antenne;

3. constitution d'une base photographique d'environ 200 photographies légendées qui sera disponiblme sur CD-ROM et sur le site Internet du secrétariat d'Etat;

4. élaboration d'une plaquette de présentation du ROM et rédaction d'un bulletin de liaison semestriel;

5. réalisation d'un film d'une vingtaine de minutes présentant chaque centre de recherche et les thématiques qui y sont développées( chaque laboratoire tournera une séquence de quelques minutes, le montage du film étant effectué par la cellule vidéo-son de l'Université de La Réunion)

6. actualisation de la base de données communales ayant permis de réaliser le volume "Les Outre-mers" (intégration des recensements de Polynésie française, Nouvelle-Calédonie et Wallis-et-Futuna [1996], et de Mayotte, [1997]), et constitution de bases de données socio-économiques des Etats constituant l'environnement régional des Déaprtements français d'Amérique (DFA) et des outre-mers des aires Pacifique et indo-océanique.

7. réalisation d'études sur les thèmes considérés comme prioritaires par le secrétariat d'Etat: les dynamiques spatiales des espaces ultramarins français; gestion et aménagement des outre-mers français dans leur environnement régional; les relations entre les outre-mers français, la métropole et l'Union européenne;

8. alimentation du site Internet du secrétariat d'Etat.

L'un des objectifs du R.O.M. est de coordonner des actions scientifiques menées conjointement dans les outre-mers. Il peut également participer à des actions pédagogiques: utilisation de la base de données communales dans le cadre des enseignements de statistique et de cartographie; exploitation des données par les étudiants préparant un diplôme (plusieurs étudiants de maîtrise ont déjà soutenu des mémoires qui nécessitaient l'utilisation de cette base). Le ROM, outil de travail pour les enseignants-chercheurs, les étudiants et les décideurs, n'est pas un réseau statique et fermé mais dynamique et ouvert. Il devrait évoluer en intégrant les outre-mers européens et les chercheurs d'autres disciplines travaillant sur les espaces ultramarins (histoire, sociologie, ethnologie, économie, etc.).


Projet de recherches autour de l'oeuvre de Raymond DECARY

Martine BALARD

Edmond MAESTRI

 

Raymond DECARY fut un administrateur colonial qui, arrivé à Madagascar en 1916 n'en partit qu'en 1947, quelques mois avant les évènements.

C'est une carrière coloniale d'une extrême longévité qui lui permit de gravir tous les échelons de la hiérarchie administrative mais aussi de parcourir la Grande Ile en tous sens et d'en maîtriser la langue.

Deux dates sont importantes:

*1921: il entre à l'Ecole Coloniale où son professeur sera Maurice DELAFOSSE "le père des savoirs africanistes", ce savant qui voulait par un programme réformiste (1918) protéger l'Afrique des civilisations traditionnelles des méfaits produits par les mécanismes d'acculturation apportées par le colonialisme.

*1937: le Gouverneur Général CAYLA lui confia, en raison de sa vaste culture, la création de la recherche scientifique à Madagascar.

Son oeuvre fut immense et caractérisée par son aspect encyclopédique aussi bien dans le domaine des sciences de la nature que dans celui des sciences de l'Homme.

Quelques exemples:

- comme naturaliste, il constitua un herbier comprenant plus de 19 000 phanérogames (désormais herbier de référence de Madagascar au Museum d'Histoire Naturelle) et de milliers de cryptogrammes. Il publia Plantes et animaux de Madagascar ou encore La Faune malgache.

- c'est un géographe: sa première étude porte sur la morphogénie de la baie de Diégo-Suarez et sa monographie régionale sur l'Androy reste un ouvrage de référence.

- Linguiste, il établit un lexique français/antandroy

- comme historien, il publia L'établissement de Ste Marie de Madagascar sous la Restauration et le rôle de Sylvain ROUX, Les voyages du lieutenant de vaisseau Frappaz dans les mers desIndes, et de nombreux articles.

-Parce que sa pensée et son rapport au pays se repaissent de toutes ces curiosités, il fut aussi ethnologue. Il envoya au Musée du Trocadéro, puis au Musée de l'Homme entre 1920 et 1973 douze collections ethnographiques, soit 797 objets concernant tous les aspects de la vie quotidienne, domestique, sociale, culturelle et religieuse. Il organisera plusieurs missions concernant la musique et la danse (Petit/Clérisse) et publiera vingt livres et plus de 400 articles.

A Madagascar, il mit en place un programme original de recherches scientifiques dont -il faut bien le dire- l'ethnologie constituait la clef de voûte(politique de publications de recherches, travail à l'Académie des sciences malgache, création, ou plutôt restauration d'un musée des civilisations, inventaire général du mobilier et du matériel ethnographique malgaches).

En 1973, à sa mort, il légua sa bibliothèque à l'Académie des Sciences d'Outre-mer, ses archives (qui sont impressionnantes) à la Bibliothèque du Museum National d'Histoire Naturelle. Pourtant, cette oeuvre considérable va subir à deux reprises l'ostracisme du milieu universitaire.

L'ostracisme de ses contemporains:

Au début du XX° siècle, beaucoup d'administrateurs coloniaux ont fait des populations qu'ils gèrent des objets d'études. L'ethnologie est ainsi en grande partie nourrie de l'expérience de la gestion coloniale. Elle leur offrait une opportunité de liberté dans l'exercice quotidien de leurs tâches.

Ces administrateurs se plieront aux nouvelles règles de méthodes proposées par les spécialistes universitaires et même s'ils ont peu de liens avec l'école sociologique durkheimienne, ils participeront à la construction du savoir nouveau en sciences sociales. Ils campent sur les frontières entre le terrain et la théorie dont ils fournissent l'essentiel des matériaux. On peut même dire que leurs excursions coloniales sont déterminantes.

Ils sont à la fois plus lucides et plus conscients que leurs contemporains sur les mécanismes d'acculturation à l'oeuvre dans le colonialisme tout en étant paradoxalement chargés de sa mise en oeuvre.

Ce groupe hybride (conduit par Delafosse et dans lequel on peut compter Decary) ne sera jamais intégré dans le gotha universitaire. Il y aura une ethnologie savante parisienne qui institutionnalisera de plus en plus ses réflexions et des observateurs de terrain pour l'alimenter.

Leur parcours de broussards atypiques, le fait qu'ils ne puissent faire etat d'un cursus calibré de normaliens agrégés vaudront à leurs travaux (écrits théoriques, mais aussi recueils de collections) d'être pillés et disqualifiés par bon nombre d'ethnologues de l'Institut d'ethnologie. Cela ne sera pas sans conséquence sur le contenu du savoir anthropologique.

L'ostracisme des historiens:

Les historiens, après les Indépendances, ont renouvelé à leur façon cet ostracisme en établissant un lien étroit entre leur oeuvre scientifique et leurs tâches de gestionnaires coloniaux. Cette vision fut souvent réductrice: elle portait plus volontiers l'éclairage sur leurs fonctions officielles d'administrateurs coloniaux et laissait de ce fait dans l'ombre leur oeuvre ethnologique.

L'ouverture de ces champs de recherches aujourd'hui est important: il est nécessaire de revisiter le patrimoine historique présneté par les ethnologues et notamment Decary. Ses recherches ont permis la constitution d'archives considérables qui constituent ce qu'on pourrait appeler un"patrimoine-savoir" qu'il convient de remettre au jour en recherchant la collaboration de chercheurs malgaches. Il en va ainsi, par exemple, du travail de Raymond Decary sur les tatouages qui représente, à ce jour, la seue anthologie du tatouage malgache. Or cette étude est susceptible d'apporter des éclairages et des éléments précieux à verser au dossier des recherches sur les origines du peuple malgache(1).

L'intérêt de l'oeuvre de Decary pour les chercheurs de la région est considérable.

1. cf Martine Balard, Parure d'ancêtres, Fieminan'taolo, (Du tatouage et du felana malgaches... à leurs origines indonésiennes), à paraître aux éditions L'Harmattan.


Patrimoine industriel: le sucre à Bourbon

Jean-François GERAUD, PRAG, Université de La Réunion

Il est important que l'historien ne laisse pas aux médias seuls la description et l'analyse du patrimoine; les non spécialistes tiennent des discours mal documentés, troubles, qui peuvent être teintés de racisme. Le patrimoine pose en effet la question de l'étude des "choses" à transmettre. L'historien doit mettre au jour les liens que le patrimoine entretient avec les mythes, ceux fondateurs de la nation en particulier, et la perversité du nationalisme. La "mise en histoire" du patrimoine le soumet à une connaissance scientifique, épurante, qui permet un nouveau type d'histoire, celle des "objets" au sens large, et celle des hommes autour et dans ces objets. Elle permet aussi de classer, trier, et d'échapper à la tentation de tout garder. Braudel a défini la raison pour laquelle une chose pouvait entrer dans le patrimoine: c'est qu'elle entre dans "l'essentiel de soi". C'est l'histoire qui permet de définir ce qu'est "l'essentiel de soi", et l'historien est le plus qualifié des commissaires qui définissent les critères définition et d'appropriation du patrimoine: la rareté; la valeur scientifique; la valeur de communication, car l'objet est un signe.

Bien que La Réunion soit perçue comme une terre agricole, elle n'en conserve pas moins d'importantes traces d'un patrimoine industriel, dont l'ampleur des vestiges parfois étonne. Il s'agit pour l'essentiel d'un patrimoine agro-industriel, lié directement aux activités agricoles ou induites par elles. Mais d'une manière générale, c'est un patrimoine caché, oublié souvent de l'iconographie (images, mais aussi cartes et plans), dans l'abandon que révèlent les friches, au sens fort, envahies par l'exubérante végétation tropicale, recouvertes encore des jachères de la mémoire. Ces monuments du travail que la tradition locale assimile toujours à la période esclavagiste, ébranlés par les intempéries en particulier les cyclones, vidés par les ferrailleurs, ayant servi de carrière, dsicrètement rasés aujourd'hui par les promoteurs, disparaissent du sol de l'île. Il a fallu attendre près de quinze ans, après les Antilles, pour que la recherche universitaire s'y intéresse (1)!

Les usines sucrières sont le témoignange de l'industrialisation d'une région périphérique. Cette industrialisation a été gommée, son poids minoré. C'est ainsi par exemple que l'on rabache que les usines étaient au nombre de 189, alors que leur nombre a très largement dépassé les 200. Cet effacement de la chance industrielle, dont l'étude montre que l'île n'a pas eu le choix qu'entre l'agriculture et l'assistanat, efface aussi le rôle d'un phénomène qui a été très largement à l'origine de l'évolution de l'esclavage (2) et même de son abolition. L'usine àsucre peut ainsi paradoxalement être considérée à La Réunion comme le chaînon manquant entre l'échec de l'abolition de l'esclavage de 1794/1796, et la réussite de celle de 1848. L'étude des usines permet d'atteindre ainsi un triple objectif: la connaissance d'un passé évidé, l'amorce d'une conservation patrimoniale, la création, ce faisant, d'archives du futur, auxquelles le futur posera les questions de son temps: car on ne sait pas quelle histoire les historiens du futur feront de notre présent.

L'étude des usines recoupe en partie l'archéologie industrielle. Il y a deux conceptions de l'archéologie industrielle. Celle archaïque et contre productive de Maurice Daumas, qui part de l'inventaire des vestiges au sol, et mène une description souvent aveugle où le défaut d'analyse se mêle aux erreurs d'interprétation: cette démarche a abouti à ce qu'on peut appeler le saccage du site de l'usine de Villèle, où les vestiges exhumés ont perdu toute lisibilité. Que dire de l'appellation de "tables à sucre" donnée aux profonds bacs de pierre, quand on sait que la table à sucre est une surface d'évaporation et de cristallisation du sucre, nécessairement peu profonde! Celle beaucoup plus pertinente de Jacques Pinard, qui part des archives, dont l'existence est un avantage décisif sur l'archéologie classique, pour définir à la fois les localisations, même disparues, les étapes des mutations de propriété révélatrices souvent des modifications du bâti, l'équipement mécanique. La prospection au sol ne vient que confirmer ce que l'écrit a dévoilé, hiérarchisé, et la fouille et la conservation mettent alors en oeuvre une véritable archéologie scientifique, et non une vague errance touristique: savoir une archéologie interrogative. Encore faut-il pour cette tâche avoir les compétences d'un historien, d'un historien des techniques en particulier.

L'étude des usines sucrières à La Réunion est un chantier enthousiasmant, mais aussi ardu. L'absence de sources spécifiques à ce champ, et l'éclatement des traces et indices dans une multiplicité de fonds oblige à l'examen d'un vaste corpus dont les éléments se trouvent aux Archives départementales de La Réunion, mais aussi aux ANSOMd'Aix, aux Archives nationales à Paris ainsi qu'aux Archives de la marine à Vincennes, aux archives des ports en liaison avec La Réunion, préférentiellement Bordeaux et Nantes, à quelques fonds d'instituts spécialisés comme celui d'Angers, etc.

Ce corpus a permis l'élaboration d'une metasource constituée par un logiciel établi sous Access qui permet le croisement des données et leur traitement. La propriété, l'architecture et la technologie, la main d'oeuvre sont ainsi, avec d'autres, les entrées principales du logiciel.

Les résultats du traitement de cette banque ne sont pas encore acquis. Déjà, pourtant, une cartographie fine s'ébauche. l'interpénétration des familles et des capitaux se révèle, et le rôle majeur de l'endettement. L'évolution rapide, mais différenciée, de la structure de bois à celle de pierre se lit. L'émergence d'une technologie spécifique, autocentrée, grâce au rôle de l'ingénieur polyechnicien Wetzell (3), apparaît comme un fait majeur de cette première industrialisation. L'association des esclaves, sans distinction d'ethnie, à cette modernisation technique est aussi un fait patent.

L'étude des usines, qui excède les objectifs comparables et étroits du recensement du patrimoine industriel, donne enfin sens aux paysages de notre île, où les anciennes sucreries évoquent, et jusque dans leurs cheminées, comme des tours, la déreliction des forteresses médiévales des campagnes d'Europe, dont les établissements seraient, sous nos latitudes inverses, les homologues: "châteaux doux"(4), et non plus "châteaux forts".

(1) J.F. GERAUD, Archéologie industrielle des usines sucrières à La Réunion, 1815-1915: méthodologie, recensement, localisation; l'exemple du Chaudron, D.E.A. de Lettres-civilisation, sous la direction de Claude WANQUET, Université de La Réunion, 1995; thèse en préparation sur Les usines sucrières à La Réunion, des origines à 1848.

(2) La condition des esclaves sucriers, machinistes, etc., était fort différente des esclaves de pioche; cf J.F. GERAUD, Esclaves et machines, catalogue de l'exposition Regards croisée sur l'esclavage, Musée Léon Dierx, 1998.

(3) J.F. GERAUD, Joseph Martial Wetzell (1793-1857): une révolution sucrière oubliée à La Réunion, Revue Historique des Mascareignes, n°1, 1998

(4) En jouant sur le sens de ces mots en créole: "château" est le terme qui désigne souvent le coeur de l'usine, "doux" veut dire "sucré"


Le suffrage universel à La Réunion à travers les élections de 1914 à 1929

 

Claude MEURE

Quand, il y a quelques années, on parlait élections à La Réunion, on évoquait inévitablement la fraude électorale. Le dysfonctionnement permanent d'une institution aussi fondamentale pour la démocratie que celle du suffrage universel pose problème à l'historien. Il doit d'abord définir ce phénomène polymorphe, établir en quelque sorte une typologie des multiples procédés en usage. Cette analyse des mécanismes de la campagne électorale met en évidence des stratégies, fondées sur l'optimisation des techniques de fraude en fonction des atouts politiques de chaque parti.

Le regard critique, voire scandalisé, que la métropole porta sur les pratiques électorales des colonies, vers le début du XX°siècle, ouvre un autre débat: la fraude aurait-elle été une spécificité coloniale? La comparaison entre le comportement électoral des métropolitains et celui des coloniaux ne fait pas apparaître de différence de nature mais un différentiel chronologique: les électeurs réunionnais n'ont pas fraudé autrement que les métropolitains, mais ils ont fraudé après. Dans leur apprentissage du suffrage universel, les électeurs réunionnais apparaissent "en retard" sur leurs homologues de l'hexagone.

L'étude des comportements déviants par rapport à la norme institutionnelle induit logiquement une question fondamentale et complexe: dans quelle mesure les particularités de la société coloniale influencent-elles le fonctionnement de la vie politique réunionnaise? Plus précisément, quelles modifications le fait colonial apporte-t-il au déroulement de la campagne électorale, moment privilégié de la vie politique? On n'a pas, à l'heure actuelle, de réponses définitives à cette question, mais seulement des hypothèses de travail.

1. Les élections à La Réunion de 1919 à 1929. Moeurs électorales d'une société coloniale. Mémoire de maîtrise, 1994

La première partie de ce mémoire est une chronique de toutes les élections - municipales, cantonales, législatives, sénatoriales - qui se sont déroulées au cours de la décennie 1920. Les années 1906 et 1924 sont des dates-charnières de l'histoire politique à La Réunion. La première marque le début de l'époque radicale dite "blocarde" après la disparition des deux grandes figures républicaines, Louis Brunet et François de Mahy. La seconde inaugure l'union des partis pour la défense des intérêtes économiques de l'île.

Aux législatives de 1914, la "méthode Gasparin", c'est-à-dire l'appui explicite de l'administration aux candidats blocards, avec usage des armes pour intimider et décourager l'adversaire, permet aux candidats "officiels", Gasparin et Boussenot, d'assurer leur mainmise sur la colonie: la campagne fait 12 morts et 162 blessés. Les gens sont terrorisés et personne ne se déplace pour aller voter, mais le gouverneur Duprat lâche ce mot, resté célèbre: "Messieurs Boussenot et Gasparin n'ont pas besoin d'électeurs pour être élus". A l'issue de la Grande Guerre, le souvenir de la terreur de 1914 fait qu'il ne se trouve aucun compétiteur pour affronter les deux députés sortants qui l'emportent confortablement, les "machines automatiques à voter" ayant fait leur travail. Soutenus ouvertement par le gouverneur Brochard, les blocards triomphent partout, aux législatives, aux municipales et aux cantonales (1919), ainsi qu'à la sénatoriale (1920).

Les législatives de 1924 sont injustement méconnues; elles constituent l'un des moments forts de la vie politique locale; c'est, à notre connaissance, la première élection où des idées sont débattues. Le premier thème, celui de la fraude électorale, vise les députés sortants Boussenot et Gasparin; il est développé par le duo Palant-Archambaud qui constitue une liste étonnante: Jules Palant, vénérable de la loge maçonnique de Saint-Denis et penseur du radicalisme local, fur l'organisateur de toutes les campagnes blocardes depuis 1910, et par conséquent le spécialiste de la fraude et de la pression officielle; Archambaud est l'ancien député de droite de La Réunion (1906-1914), il fut donc l'adversaire acharné des blocards et de Palant pendant plus de vingt ans et un véritable chef de guerre à la tête de ses nombreux colons... La conséquence la plus remarquable en est sans doute la campagne de pécheur repentant que se crut obligé de mener Lucien Gasparin, se faisant même donner, lui le radical athée, l'absolution publique par le curé de Saint-Paul!

L'autre thème, celui de la défense des intérêts créoles, surgit avec violence à la suite d'une série de coups de théâtre et de rebondissements: abandon d'Archambaud, puis désistement de Palant, faute de colistier; rupture entre Boussenot et Gasparin; alliance de Gasparin avec Auguste Brunet, ancien gouverneur par intérim de Madagascar mais non confirmé à ce poste comme titulaire, ce qui est considéré comme un affront infligé aux créoles. Le contentieux latent entre créoles et métropolitains pour l'attribution des postes administratifs - il y a deux administrations, l'une du cadre métropolitain dépendant du budget national et correctement rémunérée, l'autre du cadre local, dépendant du budget de la colonie et médiocrement rémunérée - éclate dans la presse. Dans l'opinion, le soutien systématique du gouverneur aux blocards (dont le leader est le métropolitain Georges Boussenot) conforte un amalgame entre radicalisme-administration-métropolitain-pression officielle qui n'est pas dénué de tout fondement. Les arguments hélas dégénèrent en insultes racistes: à Boussenot qui, dans son journal traite certains de ses adversaires politiques "d'hommes de couleur", ce qui se veut désobligeant, Le Progrès répond par ce slogan: "la peau, c'est notre drapeau!". Malgré l'appui de l'administration, mais avec le soutien actif de la plupart des municipalités, la liste Brunet-Gasparin l'emporte. L'année 1924 marque donc la fin du radicalisme d'importation et ouvre, pour les contemporains, une ère nouvelle de solidarité créole et de sincérité électorale.

Mais dès les municipales de 1925, les partisans de la "solidarité créole" apprennent à leurs dépens que, pour faire un résultat électoral, les pressions patronales sont tout aussi efficaces que celles qui émanent de l'administration. l'union sacrée des créoles s'est réalisée pour la défense des intérêts des industriels et gros propriétaires, pas pour l'élevation du niveau de vie des petits planteurs. Cette période qui perdure jusqsu'en 1936 est dominée par le trio parlementaire Brunet-Gasparin-Bénard, qui prétend représenter les composantes de la société réunionnnaise. Lucien Gasparin symbolise l'accession des noirs et des métis aux droits politiques, il est la caution raciale qui est censée éviter l'explosion sociale. auguste Brunet, dernier descendant de la "dynastie" incarne la bonne société créole; cultivé, compétent, il est le "technicien" qui surveille à la Chambre l'élaboration des lois coloniales. Léonus Bénard représente le monde du sucre dont il est devenu la plus grosse fortune; après avoir évincé son ruival Adrien Lagourgue, il devient en 1928 sénateur et président du Conseil général, confirmé par sa trimphale réélection sénatoriale en 1929. Mais il n'a pas oublié la modestie de ses origines (son père était bazardier à La rivière Saint-Louis) et il manifeste un souci paternaliste mais sincère d'améliorer le sort des petits planteurs. Cette unité de façade cache une grande confusion idéologique. elle réunit à la fois des conservateurs qui se résignent à accepter les principes républicains contre le retardement de l'application des lois sociales et des réformistes qui concèdent quelques accords syndiacaux en guise de contre-feux sociaux.

La seconde partie du mémoire est une analyse détaillée des procédés de fraudes mis en oeuvre au cours des campagnes électorales. Les pressions exercées sur les électeurs sont contraires à l'éthique républicaine du moment, mais elles sont irresistibles à La Réunion, où l'on note une quasi-absence de classe moyenne et une très forte dépendance économique et sociale des petites gens. Elles émanent de trois sources: les pressions patronales sur les petis colons, les ouvriers et les journaliers; les pressions cléricales sur les fidèles (90% decatholiques pratiquants); les pressions "officielles" des gouverneurs et des maires sur leurs administrés et sur leurs personnels.

La fraude est organisée et systématique. C'est une donnée du jeu politique intégrée par les états-majors des partis et acceptée comme normale par l'immense majorité de la population. On a vu des cas où elle peut devenir un sujet de fierté de la part du fraudeur victorieux. Le rôle des comités électoraux est de trouver le "nerf de la guerre" auprès des commanditaires politiques et d'organiser les tactiques en fonction de ressources financières et humaines. En suivant le déroulement chronologique d'une campagne, on passe par plusieurs étapes obligées:

La législation électorale est certes inadaptée à la société coloniale, mais le manque d'objectivité des tribunaux et la possibilité de manoeuvres dilatoires discréditent la justice: il suffit pour un maire fraudeur de tenir quatre ans, grâce à des procédures d'appel et de cassation pour se représenter au scrutin suivant dans les mêmes conditions favorables, l'éventuelle condamnation à venir frappant un mandat déjà écoulé. Durant toutes les années 1906-1936, les scrutins ne sont que l'occasion de combats pour le pouvoir, sans qu'aucun programme ne soit proposé aux électeurs. D'une manière générale, on ne peut considérer les scores électoraux de cette période comme l'expression du peuple souverain, mais seulement comme le résultat des efforts déployés par les candidats pour se faire élire. Ils sont davantage la mesure des rapports de force au sein des élites que la traduction d'une hypothétique volonté populaire.

2. Apprentissage du suffrage universel en France et à La Réunion. Mémoire de D.E.A., 1995

L'analyse comparative des moeurs électorales françaises et réunionnaises fait apparaître une typologie similaire des infractions. En revanche, la classification chronologique de ces mêmes infractions montre qu'il existe une différence importante entre les rythmes d'évolution. en France, la fraude massive, les irrégularités grossières et les violences s'exercent principalement entre 1848 et 1884. De 1884 à 1914, une meilleure assimilation de la loi électorale suscite des techniques de fraude plus subtiles. Les lois sur l'isoloir et l'enveloppe assurent, après 1914 un véritable secret du vote: les fraudes disparaissent, le suffrage universel passe dans les moeurs. A La Réunion, on est encore en 1939 dans la période de la fraude ouverte et massive, et il n'y a guère plus d'une vingtaine d'années qu'un consensus populaire s'est imposé pour accepter le suffrage universel comme mode de désignation des dirigeants politiques.

Pour les Français des années 1920, la différence de comportement entre les électeurs de métropole et ceux de La Réunion est telle que s'impose la vision d'une colonie indigne du suffrage universel qu'elle bafoue à chaque élection. On se pose la question de la nécessité d'y conserver l'exercice du droit de vote. Un courant libéral, composé de coloniaux anti-assimilationnistes (Leroy-Beaulieu, Jules Harmand) réclame la suppression des élections dans les colonies. Devant la menace de devenir des citoyens de seconde zone, une des réponses des colonies, en particulier de La Réunion, est la revendication du statut départemental.

Notre étude pourrait laisser le sentiment général de l'inutilité du suffrage universel dans la vie politique réunionnaise. Il n'en est rien. La confrontation politique des forces économiques et des institutions républicaines, génératrices de clientélisme et de pression administrative, a du moins contraint la classe dominante à composer, ne serait-ce que le temps d'une campagne électorale, avec la masse des dominés. Comme Maurice Agulhon le dit des Antilles, "il devait en sortir - non certes la fin du système colonial- mais un type d'évolution fort différent du type africain."


La perception des faits nationaux et internationaux à travers la presse réunionnaise de 1848 à 1946

Philippe PARIAT

Ce travail de recherche envisage de mettre en évidence l'évolution de parutions diverses et nombreuses, àtravers leur structure, leur idéologie ainsi que le message qu'elles font passer auprès d'un lectorat apparemment aisé. Notre but n'est pas d'écrire une histoire classique des journaux de l'île. Nous souhaitons nous efforcer de mettre en évidence tous les phénomènes essentiels extérieurs et intérieurs à l'île au moment où la presse acquiert de nouvelles limites juridiques, législatives, et commence à jouer un rôle important. Nous envisageons de traiter l'histoire d'une façon nouvelle, qui permette de mettre à la fois l'orientation contemporaine de la recherche en matière d'histoire, de sociologie et de l'évolution de la définition que les journaux donnent de leur nature et de leur constitution. Or, l'accent est mis spontanément sur les dirigeants de cette société mais les simples gens restent absents de cette analyse; le problème est de déplacer la lumière de "la tête vers les jambes". En fin de compte, ce n'est pas parce qu'ils sont portés par toute une population que les journaux ont cette dansité et cette ampleur. Il n'y a pas de travail sur les journaux qui ne contienne, quelle que soit sa perspective, le sort d'une humanité tout entière. Cette étude ne doit pas privilégier la part classique de la vie, ni se limiter aux pratiques mais s'intéresser aux comportements et aux attitudes des hommes. Ainsi, l'étude se dilate aux dimensions des communautés pour en rendre compte de façon concrète et tangible dans l'espace et le temps. La société réunionnaise est ainsi intégrée dans une histoire plus large.

 

Mes travaux en sont à leur début. Toutefois, de 1794 à 1900, il y a eu 111 titres avec 84 périodiques. La périodicité évolue avec le temps. La plupart des journaux sont hebdomadaires jusque dans les années 1860 et bi-hebdomadaires dans les années 1870, de 1880 à 1890 ils sont pour un tiers bi-hebdomadaires, pour un autre tiers tri-hebdomadaires, le restant sont des quotidiens dont Le créole de l'Ile de la Réunion fondé en 1882, premier organe de presse de la colonie à paraître tous les jours. Dans la dernière décennie on ne trouve plus que des quotidiens. De façon générale, en l'état des recherches, aucune année ne descend en-dessous de 3 journaux.

Le régime politique et juridique de la presse a une influence très nette sur le nombre des journaux. Les années 1883-1886 sont les plus florissantes. La suppression en 1880 de l'autorisation préalable accordée par le gouverneur et dont l'alignement sur le régime juridique métropolitain (loi de 1881) ont conduit à une explosion de l'expression et une frénésie d'écriture (12 journaux en 1885). La même situation se retrouve en métropole. Les nouvelles conditions économiques vont faire retomber le nombre à 5 en 1890. Toutefois cette période est celle d'un certain renouvellement. Cinq journaux durèrent plus de quinze ans parfois sous des titres différents mais 50% des journaux n'ont pas dépassé la première année.

Il faut attendre 1848 pour que la colonie soit traitée à égalité dans ce qui devient la Réunion, son vocable définitif afin de mieux signifier le changement. Dix journaux nouveaux verront le jour pendant cette période mais sept ne vivront que quelques mois. La presse clandestine peut paraître au grand jour comme Le Bien public qui écrit le 29 mai 1848: "ce journal né d'une pensée libérale et dirigé par quelques colons, continuera à dire la vérité au pays et à soutenir avec indépendance ses véritables intérêts (...). Que les esprits timides se rassurent : le Cri Public de 1848 a le culte de la légalité". Le journal devient un lieu de débat ouvert. Ainsi face aux thèses esclavagistes défendues par Prosper de Greslan dans Le Journal du Commerce, Auguste Brunet avocat libéral essaie de faire accepter l'émancipation dans les colonnes de la Démocratie Libérale le 7 août 1848: " Nous le disons hautement et sans crainte de nous tromper: l'inquiétude du pays n'a point d'objet; sa défiance n'a point de fondement; l'indemnité ne court aucun risque"; faisant référence à une émancipation inséparable de l'indemnisation, position que la 1ère République avait refusé en 1794. Mais avec Napoléon III, la censure revient et la presse locale subit à nouveau plus de contraintes administratives que sur le continent. Il faut toujours obtenit l'autorisation préalable du gouverneur. Les nouvelles libertés accordées dans les colonies tropicales ont crée des équilibres instables. De ce fait la République limite les avancées sociales et désamorce. Le 7 août 1850 est adoptée une loi sur les délits de presse visant à protéger trois éléments de la société réunionnnaise: les ex-exclaves, les Grands Blancs, les fonctionnaires métropolitains, avec des peines de prison et une amende en cas de défense ou provocation par voie de presse contre les anciennes classes de population coloniales et l'exciation à la résistance contre l'autorité métropolitaine.

Le décret organique de février 1852 impose une double contrainte: l'autorisation préalable et le cautionnement, c'en est fini des polémiques par articles interposés. Mais en 1863, un décret de Napoléon III assimile la presse coloniale à la presse métropolitaine et lui accorde les mêmes droits c'est-à-dire les mêmes obligations sous un dehors de libéralisme.

Paradoxalement le gouvernement favorise la multiplication de la presse pour affaiblir la presse critique. De 1852 à 1870, la rupture se marque par les événements de 1868 à Saint Denis où la presse sera mise au pas avec l'interdiction de raconter les faits dénoncés.

C'est la IIIème République qui ramène la liberté de la presse puis décide en 1880 la suppression de l'autorisation préalable. Ainsi la Réunion est totalmeent alignée sur le régime du continent et la loi de 1881 sur la presse y est applicable.

La presse réunionnnaise est essentiellement dyonisienne, mais elle a existé malgré tout à Saint Paul de 1832 à 1862 et à Saint Pierre de 1862 à 1900 environ. Saint Pierre a suivi Saint Paul lors du transfert du tribunal de première instance. La proximité

 

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