Lettres de poilus réunionnais:
Deux jours après la mobilisation en France, c'est au tour des Réunionnais de répondre à l'appel de la patrie en guerre: rapidement, un grand nombre de volontaires se présente à la caserne Lambert, à Saint Denis, en sus des réservistes.
Au total, 14 616 mobilisés, sur 150 000 habitants, dont plus de 12 000 partent vers la "mère-patrie"; plus de 1000 d'entre eux meurent au cours du conflit, le nombre de blessés restant difficile à chiffrer. D'autant que le retour au pays, une fois l'armistice signé, ne se fait pas immédiatement: il faut attendre que des navires soient disponibles pour cette longue traversée. Aussi, certains "poilus" ne rentreront dans leur île qu'en 1919...
note: A.D.R. Archives de La Réunion; ce sont les sources utilisées par Prosper EVE, dans son livre La première guerre mondiale, vue par les poilus réunionnais, éditions CNH, 1992
Voir aussi: Daniel Vaxelaire, L'histoire de La Réunion, vol.2, éditions Orphie, 1999.
« Dans le
Bois-le-Prêtre- il fait beau sur ce séjour- mon bataillon qui
était à gauche de ma compagnie le tout a été
anéanti par les obus des 77, 94, et 105 allemands et aussi par les
mitrailleuses allemandes; moi à cet endroit j'ai reçu un choc
d'éclat d'obus de 77 je suis resté plus de vingt minutes en
faiblesse, quand j'ai pu prendre connaissance il y avait un lieutenant et
moi qui étaient de retour sur 300 hommes. Cher père dès ce jour j'ai été évacué du front et j'ai fait deux jours à l'hôpital de Paris; où j'ai été désigné pour partir rejoindre et encadrer les troupes sénégalaises à Marseille pour partir en Turquie, c'est-à-dire aux Dardanelles là où j'ai été à nouveau blessé. En ce moment je vous écris je suis bien et je pars de nouveau sur le front aujourd'hui le 4 juin pour faire un grand coup à Châlon-sur-Marne où il y a déjà 3 corps d'armée réunis. Enfin cher parent je pars. A vous de ne plus me correspondre car je ne recevrai plus vos lettres. Quand je vous donnerai mon adresse vous m'écrirez. Je ne peux vous écrire plus long, en ce moment il est 3 heures du matin et je dois être armé à 6 heures pour retourner venger contre les Allemands boches, les crimes qu'ils font contre nos soldats de France ces pauvres frères bien-aimés. Reconsolez-vous mes chers parents joignez-vous à moi de cur pour dire à haute voix Vive la France Bien des compliments à toute la famille. Votre fils qui vous aime. » Emile Bègue (A.D.R. 1 Per 82/3, Le Progrès, 14 septembre 1915) |
A.D.R., 1Per 81/14, Le Peuple, 26 octobre 1915, ( extrait)